Les abysses de l’enfer

TW: Violence conjugale

Maya a su qu’il fallait qu’elle quitte Carl le jour où elle a vu ses yeux s’injecter de sang tant une colère profonde l’habitait. C’était un soir d’été, ils étaient sortis prendre un verre avec les amis de Carl. Maya passait une belle soirée. Lana et Pauline les compagnes respectives de David et Paul semblaient l’apprécier. Le courant passait bien. Le sens de l’humour de Maya ne laissait personne de marbre. Cela faisait longtemps qu’elle ne s’était pas sentie si bien. Un sourire irradiait le visage de Carl. Depuis quelques mois, elle n’avait droit à ce sourire qu’en public. Lorsqu’ils se retrouvaient seuls, son expression devenait sombre presque malheureuse. Maya était alors emplie d’une satisfaction douce et délicieuse en le voyant si joyeux. Cela ne dura pas très longtemps. Tout changea quand elle sentit la main pleine de fermeté de Carl presser son dos. Une froideur se répandit en elle. Elle se tut immédiatement. Elle devina qu’il lui reprochait quelque chose. Elle savait qu’elle était coupable, mais de quoi ? Lorsqu’il annonça qu’il était temps de rentrer, son rythme cardiaque s’accéléra. La sanction n’allait pas tarder à tomber.
Durant le trajet menant à la maison, Carl resta silencieux. Il était comme dans un autre monde. Maya n’essaya pas de lui tirer un mot. Elle tordait machinalement un mouchoir dans ses mains, un geste d’agitation qui agaça Carl. Il lui jeta un regard noir qu’elle devina dans la pénombre de la voiture. Elle rangea le mouchoir. Les yeux de Carl le lui avaient ordonné en silence.
Sur le seuil de la porte d’entrée, il tourna la serrure et lui ordonna d’une voix sévère de rentrer la première. Il claqua la porte et commença :
— C’était quoi ça ?
— C’est-à-dire ? répondit Maya.
— Maya, Maya, Maya, dit-il en fredonnant. Tu ne me prendrais pas pour un imbécile ?
— Non…
— Alors, dis-moi pourquoi tu as dragué mes amis devant moi !
Elle fut surprise par l’abondance de son imagination et l’énergie qu’il déployait à lui faire des reproches vide de sens. Pire, c’était de la paranoïa.
— Tu ne sais pas te contrôler hein. Tu riais à tout. J’ai vu comment tu les regardais à tour de rôle. Tu n’es qu’une pute.
En prononçant ces mots il l’avait cassée, ces mots étaient comme tatoués en elle. Jamais, elle n’avait reçu des injures pareilles. Un sentiment de paralysie et de fêlure l’enveloppa. Le mot pute retentissait, détonnait dans sa tête et vibrait en elle violemment. La vue de Maya se troubla et une envie de vomir l’envahit. Il s’approcha d’elle et lui susurra à l’oreille :
— Qu’est-ce que tu es belle quand tu as peur ! Crains-moi, ça t’évitera de te comporter comme une idiote…
Les sons peinèrent à sortir de la bouche de Maya alors elle acquiesça d’un signe de tête. Elle était comme perdue dans un brouillard épais. Elle voulait le haïr mais elle n’y arrivait pas. Elle détestait cette sensation de vide qui l’inondait à chaque fois qu’elle envisageait de vivre sans lui. Mais l’amour n’est pas fait pour nous plonger dans les abysses de l’enfer…

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